Cet article a pour origine le 1er volet de la trilogie de 2004 présenté au Récif du vendredi de Courbevoie (cf. les musts sur ce site); il a été enrichi et actualisé par nos soins sans compter les commentaires de notre mascotte « RID’AIL ». Suite de 1- QU'EST-CE QU'UN HIPPOCAMPE ? 3- LES DIFFERENTES ESPECES QUE L'ON PEUT ACHETER EN FRANCE
4- LES MOEURS DES HIPPOCAMPES
LE LANGAGE
S’il se sent mal, s’il est malade ou stressé un hippocampe noircit.
En pleine parade amoureuse, il devient plus éclatant, passant ainsi du jaune au blanc.
Il y a un langage des couleurs. Pour avoir plus de détails sur les couleurs des hippocampes lisez la rubrique "La couleur des hippocampes" .
Il utiliserait aussi un langage sonore : certains plongeurs ont affirmé avoir entendu avec surprise des hippocampes émettre des cliquetis, obtenus en frottant certains os dans leur crâne. Pour certains auteurs, ils communiquent en effet entre eux en émettant des sons qui échappent à l’oreille humaine. Cela se traduit par des vibrations que l’on peut ressentir si l’on tient l’hippocampe dans la main, pour le soigner par exemple.
L'HEDONISME
Le principe hédonistique de base règne chez les hippocampes ; il s’appelle la loi du moindre effort. Ils chassent ainsi à vue comme des snipers; ils s’attachent à une algue, une éponge, une roche ou une gorgone, dans une zone giboyeuse à faible courant et attendent qu’une proie passe à portée. Pas de chasse à courre ici.
Leur vie est consacrée au plaisir. Ainsi les femelles Reidi adorent passer leur journée à fureter et chercher des proies. Ce sont de petits prédateurs qui adorent la chasse. La sieste est aussi une activité très prisée, surtout chez les mâles. Quant aux femelles, comme certains juvéniles et mâles non enceints, elles adorent danser dans le courant : elles ondulent tantôt sur le côté, tantôt d’avant en arrière dans le courant. Elle aiment monter à la surface et se laisser tomber au fond après avoir enroulé leur queue, et tout cela face à la vitre frontale des aquariums : spectacle garanti.
LE CARACTERE
Pour bien montrer les différences de caractères liées en grande partie au sexe, mâle ou femelle ; il faut savoir qu’ils réagissent de manière très différentes au même événement.
Une anecdote : Leur transfert en poche plastique de l’aquarium de quarantaine au bac principal a stressé un couple ; c’est le syndrome de la poche plastique, la peur de se retrouver dans cet espace confiné pour une longue durée comme lors du voyage de leur pays vers - le mâle qui hésitait à sortir de la poche s’est précipité dans une grotte ou il est resté caché une bonne semaine. - La femelle, elle, était visiblement ravie de son nouvel univers, mais un jour elle refusa en baissant la tête un gammare que je lui présentais ; d’abord surpris j’ai vite compris ce qui se passait ; j’avais suspendu, pour acclimater des escargots, une poche près d’elle. J’ai placé la poche à l’autre bout de l’aquarium, et la femelle a aussitôt changé d’attitude, avalant avec un plaisir évident la proie présentée.
L'ALIMENTATION
L’hippocampe est un poisson de fond, diurne et carnivore. Dans la nature, il se nourrit essentiellement de tout ce qui ressemble de près ou de loin à de petites crevettes ; il est limité par la taille de son museau ; encore que ce dernier est un peu extensible ; j’ai vu une femelle Reidi aspirer avec difficultés un gros gammare à la carapace endurcie par l’âge. A l’inverse la proie trop petite peut être dédaignée.
Il n’a pas de dents ; mais avec son museau, il aspire ses proies avec une grande force. Il provoque une dépression dans sa cavité buccale en déplaçant un os du palais ( os hyoïde ), la proie disparaît et un nuage d’eau et de fins débris sort par ses siphons au sommet de la tête. Inversement, j’ai vu une femelle Reidi déloger un gammare sous une roche en soufflant dessus, avant de l'aspirer ...
Les individus de certaines grandes espèces grégaires chassent en groupe des crevettes qu’ils ne peuvent avaler mais qu’ils cassent afin d’en absorber le contenu. Il s’agit peut-être d’une adaptation à la nourriture disponible, du début d’une évolution vers une nouvelle espèce.
C’est un gourmet : - Il prend tout son temps pour manger : il regarde, choisit puis se décide. La première fois que j’ai vu des hippocampes en animalerie, des artémias ont été mises dans un bac de poissons ordinaires et dans un bac d’hippocampes : en moins d’une minute, après une mêlée invraisemblable, il n’y avait plus de nourriture vivante dans le premier aquarium alors que les hippocampes qui n’avaient pas bougé, commençaient seulement à analyser la situation et à choisir la meilleure proie. - Les aliments secs style flocon sont des objets inertes qui ne servent strictement à rien pour lui, sauf à polluer l’eau.
Au menu nous trouvons des :
- Mysis : appelées « opposum shrimp », ce ne sont pas à proprement parler des crevettes, mais des mysidacés. Elles portent leurs petits dans une poche ventrale ou ils se développent ; une fois nés, ils doivent essayer d’échapper à leurs parents cannibales. Au bout d’un mois ils seront adultes. Ils sont transparents avec de gros yeux bien visibles et sont très appréciés des gourmets. C’est la nourriture exclusive de certains dragons de mer.
- Gammares : autre plat de choix, ils sont plus gros que les mysis ; ils portent aussi leurs petits, de 10 à 50, et font de 4 à 6 portées par an.
- Artémia Salina: originaires des lacs salés, ces animaux mesurent de 0.8 à 1.3 cm ; leur corps est très souple ; ils s’avalent facilement mais ont une faible valeur nutritive. Les hippocampes n’en rencontrent pas dans la nature. Nourris exclusivement avec cet animal, les hippocampes ne vivent pas très longtemps. Il faut enrichir ces artémias avec des algues et/ou des produits spéciaux comme le Microplan de Preiss, le Selco ou Selcon, ou le Rotirich, produits riches en acides gras insaturés, vitamine C et B12. Les artémias ne valent que ce que vaut leur propre alimentation.
- Petites crevettes Palaemonetes ou autres : elles sont appréciées par les plus grandes espèces d’hippocampes.
Attention, en aquarium il se nourrit de proies vivantes mais il peut s’habituer aux surgelés.
Une anecdote : Un couple de Reidi, après avoir échappé à l’horrible prison de mon animalier préféré a habité dans un petit aquarium de
La femelle, plus expansive et familière est venue rapidement manger les gammares vivants que je lui donnais entre deux doigts. Le mâle, plus prudent et réservé, a attendu un an pour venir prendre les mysis dégelées présentées avec une pince, uniquement s’il avait très faim.
On a souvent écrit que les hippocampes se nourrissent uniquement de proies qui bougent, ce qui est inexact. Le fait qu’elles bougent l’excite, ajoute du « fun » à la chasse mais si elles bougent trop, c’est trop dur ; les mâles ne les poursuivront pas ; ils attendront qu’elles reviennent. De plus, la tactique préférée du gammare en danger est de rester immobile, de faire le mort ; cela fait l’affaire des hippocampes qui les adorent, et les aspirent.
LA VIE AMOUREUSE
Jusqu’à ce que la mort nous sépare : Mon expérience porte sur les Reidi qui vivent en couple exclusif dans la nature. Si l’un meurt l’autre mourra ou tout au moins mettra longtemps dans la nature, jusqu’à un an, pour refaire sa vie avec un nouveau partenaire. Les Barbouri et les Kuda, eux, ne sont pas monogames. Quant à l’Histrix, il n’a pas été observé dans son milieu naturel pour que l’on ait une certitude sur la question.
Le territoire du mâle est plus petit et se trouve au centre de celui de la femelle. Mes Reidi dorment non loin l’un de l’autre. Tous les matins, les couples se reconnaissent et réaffirment leur union. Ils se prennent mutuellement par la queue, et se promènent côte à côte quelques instants, exécutant une parade amoureuse très simplifiée. Puis chacun va s’occuper de son côté pour la journée. Le mâle vient ensuite 2 à 3 fois dans la journée revoir sa compagne et réaffirmer son attachement. Puis il repart.
La parade amoureuse est un grand spectacle, très sophistiqué. Ce sont des préliminaires qui durent 6-8 heures, de l’aube au début de l’après-midi ; un record a été établi à 10 heures. Il s’agit d’un ballet complexe, d’une suite de danses qui se répètent inlassablement, chaque partenaire répondant à l’autre à l’identique. Certaines espèces de grues ont des mœurs similaires pour leur parade nuptiale. Dans ce rituel cérémonial très élégant, on distingue plusieurs mouvements auxquels chaque espèce accorde une importance différente. Il s’agit d’un langage gestuel essentiel : des couples d’espèces différentes n’ont pu s’accoupler malgré leurs efforts, comme s’ils ne se comprenaient pas.
Les différentes phases de la parade amoureuse sont les suivantes :
- L’effet gorge de pigeon et le changement de couleur : le mâle s’approche de la femelle en changeant de couleur. Des points blancs éclatants apparaissent sur sa peau, et s’étalent sur de larges surfaces. Il baisse la tête et l’appuie sur son corps ; il invite ainsi sa partenaire à commencer une danse nuptiale.
- Le tremblement : très répandu dans les espèces naines, elle consiste, pour le mâle en premier, à trembler puis à vibrer puissamment de tout son corps. La femelle lui répond en agissant de la même manière.
- La promenade en parallèle : les deux tourtereaux enlacent leurs queues et commencent à se promener serrés l’un contre l ‘autre ; ils s’arrêtent de temps en temps pour s’attacher par la queue à une algue, une roche. Ils se séparent et restent côte à côte ; l’un initie alors un mouvement que l’autre réplique immédiatement : tu montes, je monte ; tu vas vers la droite, je vais vers la droite, tu t’inclines, je m’incline etc. ; on retrouve en plus ici l’effet gorge de pigeon et le changement total de couleur.
- La « May-pole dance » : les deux partenaires, se tenant par la queue, tournent autour d’un axe imaginaire. Cette phase s’inclut de temps en temps dans la promenade.
- Les « pumping » et « pointing » : le mâle, régulièrement, ouvre largement sa poche en dressant sa queue perpendiculairement à son corps ; ce faisant il montre que sa poche est vide et qu’il est prêt à concevoir. Il vide et remplit sa poche pour la dilater et montrer à sa partenaire qu’il pourra recevoir tous ses oeufs ; la femelle répond en gonflant légèrement son petit oviducte, pour dire que ses œufs sont hydratés et qu’elle est prête ; elle s’étire et se tend vers la surface tout en maintenant la pointe de sa queue sur le sol.
- L’ascension : alors, les deux partenaires montent et descendent dans la colonne d’eau en étant presque face à face ; la femelle qui dirige la manœuvre s’approche en phase ascendante du mâle, glisse sur lui, et simule leur union, en se dérobant au dernier moment, comme pour faire durer le bref moment de l’accouplement.
Puis elle se décide et elle pénètre le mâle avec son oviducte ; les deux hippocampes se cambrent face à face ( formant un cœur stylisé ) et s’immobilisent quelques secondes, le temps pour la femelle de transférer ses œufs.
Alors le mâle s’éloigne rapidement pour répartir en se dandinant les œufs dans sa poche et les féconder.
La durée de la gestation varie selon les espèces et selon la température.
OUI (19 à 22 jours)
On constate que le pauvre mâle Reidi peut être constamment enceint, car il ne s’accorde qu’un jour après l’accouchement avant de s’accoupler à nouveau. L’accouchement se passe toujours le matin au lever du soleil. Le mâle accouche en position verticale, expulsant ses petits par de violentes secousses qui l’épuisent.
Les adultes ne mangent jamais leurs petits, car ils identifient toujours leur proie par un examen rapproché, mais ils s’en désintéressent complètement. Les jeunes, une fois nés, ont alors une existence pélagique et partent vivre dans le plancton ; 1 sur 1000 reviendra continuer sa vie sur le fond.
(à suivre)
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